Le gouvernement de transition malien n’a pas apprécié le traitement des deux médias français sur les supposées « exactions » et « atrocités » sur des civils attribuées à l’armée malienne par une organisation de défense des droits humains.
Les relations entre Paris et Bamako se distendent de jour en jour. Après l’expulsion de l’ambassadeur français, les autorités de la transition annoncent dans un communiqué du mercredi 16 mars avoir engagé « une procédure, conformément aux lois et règlements en vigueur au Mali, pour suspendre, jusqu’à nouvel ordre, la diffusion de la Radio France internationale (RFI) en ondes courte et FM et de la télévision France 24, ainsi que toutes leurs plateformes digitales sur toute l’étendue du territoire national ».
Le gouvernement malien reproche à ces médias leurs « fausses allégations faisant état d’exactions commises par les Forces armées maliennes (FAMa), contre des civils, de violation des droits de l’homme et du Droit international humanitaire ».
L’ONG de défense des droits humains Human Rights Watch (HRW) a déclaré dans un rapport publié mardi 15 mars que, depuis décembre dernier, au moins 107 civils ont été tués par des militaires maliens ou des rebelles dans le centre et le sud-ouest du Mali. Les victimes, dont la plupart auraient été exécutées sommairement, selon HWR, incluent des commerçants, des chefs de villages, des responsables religieux et des enfants. « 14 civils de l’ethnie dogon auraient été exécutés sommairement par des militaires », apparemment en représailles de la mort par engin explosif improvisé (EEI), dans la zone, de deux militaires, ajoute l’ONG.
Réaction de France Médias Monde
Le gouvernement malien dénonce ainsi des « allégations sans fondement » publiées respectivement, entre le 8 et le 15 mars 2022, à travers une déclaration de Michelle Bachelet, Haut-commissaire des Nations unies aux droits de l’homme, un rapport de HRW et un reportage de RFI. « En considérant la synchronisation de ce matraquage médiatique, le gouvernement en déduit une stratégie savamment préméditée visant à déstabiliser la transition, démoraliser le peuple malien et discréditer les vaillantes FAMa », déplore le communiqué signé par le colonel Abdoulaye Maïga, porte-parole du gouvernement et ministre de l’Administration territoriale.
« Certaines allégations, en particulier celles avancées par RFI, n’ont d’autres objectifs que de semer la haine en ethnicisant l’insécurité au Mali et dévoilent l’intention criminelle de journalistes dont certains n’ont pas séjourné au Mali, il y a plus d’un an », charge encore le gouvernement, avant de qualifier les « agissements de RFI et France 24 (…) aux pratiques et au rôle tristement célèbre de la radio +Mille Collines+ dans un événement tragique survenu en Afrique », plus précisément au Rwanda lors du génocide des Tutsis de 1994.
En réaction au communiqué des autorités maliennes, France Médias Monde, la maison mère des deux médias français, dit prendre « acte et déplore cette annonce ». Alors que les émissions des deux médias se poursuivaient jeudi matin, le groupe médiatique français « rappelle son attachement à la liberté d’informer et au travail professionnel et équilibré de ses équipes de journalistes ».
ODL/cgd/APA