Le président de la Cour Constitutionnel a jeté un véritable pavé dans la marre par rapport au respect du chronogramme électoral.
En marge du colloque international sur le processus électoral récemment tenu à Bamako, Amadou Ousmane Touré, le président du Conseil constitutionnel, a estimé que tout n’était pas réuni pour organiser des élections. « Si c’est pour demain nous ne sommes pas prêts et même dans quelques mois nous ne le serons pas », a lancé le juge. Avant d’ajouter que « si les élections sont faites, vous n’aurez pas les résultats, on va les garder ». Il les a également sollicités à travers ces termes, « aidez-nous à avoir un budget. Nous n’avons rien pour aller aux élections ».
Sous pression de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) qui exige le retour à l’ordre constitutionnel et le respect du chronogramme de la transition, le Mali doit organiser un référendum constitutionnel le 19 mars 2023. Un premier scrutin sera suivi du premier tour de la présidentielle en février 2024. Les militaires au pouvoir après le coup d’Etat perpétré le 18 août contre le défunt président Ibrahim Boubacar Keïta, doivent faire face à une insurrection jihadiste qui secoue le pays depuis 2013.
Une détérioration de la situation sécuritaire brandie par le pouvoir de Bamako pour expliquer les retards dans le respect du chronogramme électoral Mais pour Amadou Ousmane Touré, installé à la tête de la plus haute juridiction du pays le 10 août 2020, les causes sont multiformes. « Si vous voulez marcher demain pour dire de donner les moyens à la Cour, il faut marcher et j’en prendrais la tête ». Pour lui, il n’appartient pas à la Cour de décider de l’organisation d’une élection, mais plutôt aux politiques.
Des propos qui viennent conforter la position de certains sceptiques qui doutent du respect du calendrier électoral. Outre la question des moyens, certains évoquent aussi le retard dans l’installation des démembrements de l’Autorité indépendante de gestion des élections (AIGE) censés gérer tout le processus électoral. En plus, la convocation du collège électoral pour le référendum du 19 mars n’est toujours pas faite alors qu’elle était prévue le 17 février 2023.
Pourtant, selon la loi électorale, l’installation de ceux-ci doit avoir lieu six mois avant les élections. Il s’y ajoute une situation sécuritaire toujours pas maîtrisée en dépit de l’annonce faite par le président de la transition, le 20 janvier dernier, à l’occasion de la fête de l’armée, du lancement d’une nouvelle opération de sécurisation du processus électoral dénommée « Tilé Koura ».
Pour toutes ces raisons, certaines voix politiques demandent aux autorités de la transition d’éviter de disperser leurs efforts en se consacrant uniquement à l’organisation de la présidentielle de 2024. La refondation du Mali doit être leur cheval de bataille afin d’aller vers des élections dans les meilleures conditions. Mais cette démarche pourrait bien froisser la Cedeao, car elle impliquerait un retard dans le respect du calendrier électoral.
C’est dans ce contexte que le médiateur de la Cedeao pour le Mali, l’ancien président nigérian, Goodluck Jonathan est arrivé lundi 20 février à Bamako pour un séjour de 48 heures. Une visite destinée à évaluer les progrès accomplis dans le cadre du rétablissement de l’ordre constitutionnel.
Elle intervient également au lendemain d’un sommet extraordinaire de l’organisation régionale à Addis Abeba, la capitale éthiopienne, où il a été décidé du maintien des sanctions contre les autorités maliennes jusqu’au retour à l’ordre constitutionnel.
MD/cgd/APA