Le président sénégalais envisage de saisir le Conseil constitutionnel sur les conclusions de ces concertations.
Le lundi 4 mars, le rapport final du Dialogue national, tenu les 26 et 27 février à Diamniadio, près de Dakar, a été remis au président de la République du Sénégal, Macky Sall.
Deux jours intenses de débats où les participants ont émis des propositions sur la date des élections présidentielles et sur l’après 2 avril.
Selon le document de 64 pages dont APA a reçu copie, la première journée a été marquée par les discussions sur la nouvelle date de l’élection et les modalités de participation.
Présidée par le ministre de l’Intérieur, Me Sidiki Kaba, cette commission a vu la participation du Directeur général des Elections, Thiendella Fall, des personnalités politiques, des représentants de candidats, de la Commission électorale nationale autonome et de la Société civile.
Momar NDAO et Cheikh Tidiane GADIO, représentant les candidats dits spoliés, ont exposé les dysfonctionnements au sein du Conseil constitutionnel, plaidant pour une réintégration des candidats injustement recalés. La coalition Karim 2024 dont le candidat a été recalé pour double nationalité a également réclamé le rétablissement équitable de son candidat, pointant du doigt des erreurs administratives.
Un autre collectif, mené par Alioune Sarr, a exigé une révision du processus électoral en raison de manquements techniques. Le coordonnateur de la coalition au pouvoir, Benno Bokk Yakaar (ensemble pour le même espoir), le ministre Oumar Sarr a recommandé le mois de juin pour l’élection, respectant ainsi les délais légaux.
À la suite des débats, le Directeur général des Elections a proposé trois points d’accord, notamment la fixation de la date de l’élection au 02 juin 2024 avec les 19 candidats retenus par le Conseil constitutionnel, avec la réouverture du processus pour les candidats spoliés et recalés. Ces propositions ont été unanimement approuvées, révèle le rapport.
Le même document fait savoir que le ministre des Affaires étrangères, Ismaïla Madior Fall, a conduit les débats de la Commission sur l’après 2 avril 2024. Les discussions ont porté sur la gestion du mandat présidentiel au-delà du 2 avril, soulevant l’incertitude entourant une éventuelle vacance du pouvoir.
Les échanges ont mis en lumière les divergences d’interprétation de la Constitution. La Commission a opté, dans un consensus général, pour l’application de l’article 36 de la Constitution afin d’assurer la continuité de l’État et la permanence institutionnelle.
Macky Sall envisage de saisir le Conseil constitutionnel pour recueillir son avis sur les propositions du Dialogue national.
Soupçons de corruption
Au départ, 93 dossiers de candidature à la présidentielle ont été déposés auprès du Conseil constitutionnel qui n’en a validé que 21, le 12 janvier après un premier tri ayant tenu compte de la validité ou non des parrainages. Huit jours plus tard, le 20 janvier, les Sages ont publié une liste définitive de 20 candidats. Pour double nationalité, Karim Wade, candidat du parti démocratique sénégalais (PDS) et fils de l’ancien président, Abdoulaye Wade, est recalé.
Le Samedi 3 février, le président Sall a pris une décision sans précédent en abrogeant le décret convoquant le corps électoral au 25 février. Cette action a déclenché une série d’événements qui ont plongé le Sénégal dans une crise politique inédite.
La tension entre l’Assemblée nationale et le Conseil constitutionnel a atteint son paroxysme après que le PDS ait accusé deux juges constitutionnels de corruption. Ces accusations ont jeté de l’huile sur le feu dans un climat déjà tendu.
Le 31 janvier, les députés libéraux, soutenus par une partie de la majorité, ont réussi à mettre en place une commission d’enquête parlementaire. Cette initiative a marqué le début d’une série de manœuvres politiques complexes qui ont secoué le pays.
Report des élections
Le lundi 5 février, une séance plénière s’est tenue à l’Assemblée nationale pour discuter de la proposition de loi visant à reporter les élections. Après une journée mouvementée ponctuée d’accrochages entre parlementaires, la loi a été adoptée. Cependant, cette décision n’a pas été sans conséquences. Des députés de l’opposition, qui ont protesté contre le vote sans débat, ont été violemment expulsés de la salle par des gendarmes, agissant sur demande du président de l’Assemblée nationale.
À peine deux jours plus tard, alors que Dakar et d’autres régions du pays étaient en proie à des violences, des députés ont contesté la loi devant le Conseil constitutionnel. Simultanément, 15 candidats à la présidentielle ont choisi de saisir la Cour suprême.
Les manifestations qui ont suivi la décision du report du scrutin présidentiel ont provoqué trois morts.
Le Conseil constitutionnel annule le report
Dans une décision rendue le 15 février, le Conseil constitutionnel a retoqué le décret du chef de l’Etat sénégalais et a annulé le report du scrutin du 25 février. Cependant, la haute juridiction a préféré laissé la latitude à l’administration de fixer une nouvelle date.
AC/APA