Les quotidiens sénégalais parvenus vendredi à APA titrent principalement sur l’opération de communication du gouvernement pour donner « sa part de vérité » sur les violentes manifestations du 1er et du 2 juin dans le pays, consécutivement à la condamnation ferme du farouche opposant Ousmane Sonko.
« Droit dans ses bottes », « l’Etat tire les choses au clair » sur les violentes manifestations qui ont inauguré ce mois de juin en rapport à la condamnation de l’opposant Ousmane Sonko à deux ans ferme pour corruption de la jeunesse face à la plaignante Adji Sarr, l’ex-employée du salon de massage Sweet Beauté qui l’accusait pourtant de viols et menaces de mort, notent Le Quotidien et Le Soleil. « Toutes les personnes impliquées dans les violences répondront de leurs actes », a souligné d’emblée le Premier ministre Amadou Ba, affirmant dans Bés Bi qu’ils prennent « la pleine mesure des stratégies de déstabilisation du pays ».
Il modérait hier la conférence de presse du gouvernement à laquelle les ministres de l’Intérieur, de la Justice, des Forces armées et du Commerce ont apporté leurs réponses sur les questions de l’heure concernant leurs secteurs respectifs. L’objectif de cette opération de communication était de répondre à plusieurs questions préoccupantes telles que le blocus du domicile d’Ousmane Sonko par les forces de l’ordre, pourquoi il n’est toujours pas arrêté et conduit en prison malgré sa condamnation, la coupure du signal de la télévision privée Walfadjri et les craintes autour des préparatifs de la fête de Tabaski célébrée à la fin du mois, entre autres.
S’agissant du maire de Ziguinchor (sud), il « doit sa liberté au juge », selon le ministre de la Justice, Ismaila Madior Fall, précisant que la décision concernant l’opposant classé troisième à la dernière présidentielle avec plus de 15% des suffrages « est en cours de rédaction ». « Il faut que la décision lui soit notifiée. Après, le condamné peut se constituer ou le Parquet, en charge de l’exécution de la décision, peut l’arrêter. Une fois constitué prisonnier ou arrêté, il a dix jours pour acquiescer ou contester la décision. Pour cette dernière, il peut être rejugé par la même juridiction, voire la même composition », a expliqué le garde des Sceaux.
Walf Quotidien déduit de cette « révélation du ministre de la Justice » qu’Ousmane « Sonko pourrait être rejugé » et que « tout n’est pas perdu » pour le leader du parti Pastef à huit mois de la présidentielle de 2024 qui cristallise tous les enjeux.
Interrogé sur l’information judiciaire ouverte pour éclairer la lanterne des Sénégalais sur l’utilisation des mille milliards de francs CFA dépensés par des agents de l’Etat dans la riposte de la Covid-19, à la suite du très polémique rapport de la Cour des comptes qui a établi des cas de malversations, M. Fall indique dans Sud Quotidien que « les enquêtes sont presque terminées ». Dans « sa part de vérité » que le gouvernement a livré hier à la presse, le journal remarque « toujours le statu quo » sur les « enquêtes sur les événements de mars 2021 », au début de l’histoire judiciaire de l’affaire Sonko-Adji Sarr qui avait fait quatorze morts.
Le ministre des Forces armées Sidiki Kaba, avocat de son état, a profité aussi de la cérémonie pour botter en touche les menaces de poursuites de responsables hiérarchiques de l’Etat sénégalais devant la Cour pénale internationale (CPI), des menaces notamment brandies par Juan Branco, l’avocat français d’Ousmane Sonko. « C’est de la fanfaronnade. Ceux qui le disent n’ont ni la qualité et la capacité de le faire. Il y a une confusion volontaire parce qu’on veut ternir l’image du Sénégal », déplore Me Kaba, qui « dément » en même temps l’accusation d’« achat d’armes par le palais présidentiel ».
Sur le blocus du domicile d’Ousmane Sonko, le ministre de l’Intérieur note qu’il s’explique « dans le cadre du maintien de l’ordre » étant donné qu’« on constate des décès » à chaque fois que le populaire opposant fait « une caravane, des rassemblements sans déclaration » auprès des autorités compétentes. Néanmoins, Antoine Diome soutient que les barricades autour de la maison dakaroise du maire de Ziguinchor pourraient être levées progressivement. « Ce n’est pas quelque chose de statique. C’est dynamique. Si la situation permet ou on en arrive à un moment où il faut enlever les barrières ou laisser les personnes circuler, on le fera », a-t-il souligné.
Après les « mots sur les maux » des cinq ministres, L’Observateur a recueilli « le regard critique des experts en communication sur l’opération de déconstruction du gouvernement » après les événements du 1er et du 2 juin au Sénégal. « On a assisté à une sorte de variation dans le discours qui installe le doute » parce que « la communication, ce n’est pas simplement la parole, c’est surtout des actes », notent les spécialistes. « Cette sortie montre qu’il y a une suite de l’affaire Sonko qu’on est en train de préparer », indiquent-ils.
ODL/ac/APA