Les Nations unies se disent alarmées par l’aggravation de la crise sécuritaire causée par les multiples
insurrections islamistes dans de vastes étendues du Sahel.
La situation sécuritaire dans le Sahel central, zone couvrant quelque cinq pays reste très préoccupante et l’aggravation de la crise au Soudan est une source d’inquiétude supplémentaire, a averti mardi un haut fonctionnaire de l’Onu devant le Conseil de sécurité.
« Les groupes armés non étatiques continuent de mener des attaques à grande échelle contre des cibles civiles et militaires et s’engagent dans des affrontements pour l’accès aux ressources, le contrôle territorial et l’influence », a déclaré Martha Ama Akyaa Pobee, Sous-secrétaire générale de l’Onu pour l’Afrique, qui fait partie du département des affaires politiques et de la consolidation de la paix, et des opérations de paix de l’Onu.
Le Conseil se réunissait pour évaluer l’état de la Force conjointe du G5 Sahel, qui regroupe le Burkina Faso, le Tchad, le Mali, la Mauritanie et le Niger.
Fondée en 2017, elle a pour rôle principal, en tant qu’opération militaire internationale, de contrer la menace croissante du terrorisme, d’améliorer la justice pénale, la gestion de la sécurité des frontières et la propagation de l’extrémisme religieux militant.
Les extrémistes s’affrontent
« Le terrorisme et les groupes extrémistes violents ciblent fréquemment les zones frontalières, en particulier la zone des trois frontières entre le Burkina Faso, le Mali et le Niger, dit Liptako-Gourma. A cet égard, au début de cette année, il y a eu une recrudescence des affrontements entre l’Etat islamique dans le Grand Sahara (ISGS) et Jama’at Nu rat al-Islam wal-Muslirnin (JNIM) », a-t-elle ajouté.
Dans ce contexte, « l’instabilité récente dans l’est du Sahel, au Soudan, est une source supplémentaire de préoccupation », a alerté Mme Pobee, ajoutant que « les effets dévastateurs de la déstabilisation continue du Sahel seront ressentis bien au-delà de la région et du continent africain ».
Une situation humanitaire désastreuse
Elle a rappelé que la crise sécuritaire exacerbe une situation humanitaire déjà désastreuse. Au Burkina Faso, on estime que 4,7 millions de personnes auront besoin d’une aide humanitaire cette année, contre 3,5 millions en 2022. Au Mali, 8,8 millions de personnes sont dans le besoin, contre 7,5 millions en 2022.
En ce qui concerne la Force G5, le haut fonctionnaire de l’Onu a noté que le personnel avait fait des progrès constants dans son opérationnalisation, dans un contexte de reconfiguration des forces européennes et françaises, de retrait du Mali de la Force et d’intensification des menaces dans la zone des trois frontières.
Elle a souligné que les pays du G5 Sahel étaient déterminés à renforcer la coopération intra régionale, notamment en établissant des mécanismes de coopération bilatérale et multilatérale avec les forces armées maliennes dans la lutte contre le terrorisme.
L’insécurité persiste
Cependant, elle a noté que, malgré ces efforts, l’insécurité dans la zone des trois frontières continue de croître.
Mme Pobee a souligné que l’accord tripartite entre l’Union européenne, le G5 Sahel et l’ONU devrait prendre fin en juin. Avec l’expiration de cet accord, le soutien logistique et opérationnel de la Mission des Nations unies au Mali (MINUSMA) à la Force conjointe du G5 Sahel prendra fin.
Elle a déclaré que cela « donne l’occasion de réfléchir à la manière dont la communauté internationale devrait renouveler ses approches en matière de soutien aux mécanismes de sécurité régionaux ».
Mme Pobee a ajouté que, par l’intermédiaire du bureau des droits de l’homme des Nations unies, le HCDH, l’Onu a continué à soutenir la force conjointe dans la mise en œuvre de son cadre de conformité aux droits de l’homme et au droit humanitaire international, notant que « des progrès et des changements significatifs ont été réalisés sur le plan institutionnel, juridique et comportemental ».
La force conjointe dispose désormais d’un mécanisme interne permettant d’attribuer la responsabilité des incidents, d’analyser les schémas, de prendre les mesures correctives nécessaires et d’adapter sa conduite opérationnelle.
« A l’avenir, la poursuite du travail sur les droits de l’homme avec les acteurs régionaux et nationaux de la sécurité au Sahel restera essentielle dans le contexte de la détérioration de la situation sécuritaire », a-t-elle insisté.
Dans ce contexte, Mme Pobee a souligné que le soutien politique et opérationnel des partenaires reste essentiel pour la stabilisation du Mali et de l’ensemble de la région du Sahel.
Un soutien international renouvelé permettra d’éviter que la crise sahélienne ne perturbe le fragile équilibre politique de la région et contribuera à prévenir « un nouveau débordement de l’insécurité dans les pays côtiers’.
« Pour sa part, l’Onu est prête à soutenir davantage les efforts du G5 Sahel, notamment en appuyant le renforcement des capacités dans des domaines tels que la prévention de l’extrémisme violent et de la radicalisation, l’Etat de droit et la gestion de la sécurité des frontières », a-t-elle déclaré.
Elle a rappelé que l’Onu s’était engagée à travailler avec tous les partenaires pour faire en sorte que les structures de gouvernance soient plus démocratiques et plus ouvertes, et que les populations du Sahel aient une plus grande confiance dans leurs institutions.
« Des progrès décisifs dans la lutte contre le terrorisme, l’extrémisme violent et le crime organisé au Sahel doivent être réalisés sans délai. Sans avancées significatives, il sera de plus en plus difficile d’inverser la trajectoire de la sécurité au Sahel et l’expansion continue de l’insécurité vers les pays côtiers d’Afrique de l’Ouest », a-t-elle conclu.
PR/as/fss/ac/APA